Jour 8, la piste d’Öskjuleið vers Askja

08 Septembre 2013

Désert d'Öskjuleið

La piste d’Öskjuleið mène au célèbre volcan Askja, perdu au milieu d’un désert de cendres et de lave noire : traversés de gués, oasis de verdure et bain dans le Viti marqueront cette journée. Petit-déjeuner au Bed & Breakfast de Grímsstaðir succulent. Siga propose un buffet sucré-salé avec notamment des pancakes maisons, du saumon fumé et de l’agneau qu’elle fume elle même dans son fumoir… Les deux frères Canadiens partent aussi pour Askja aujourd’hui, on s’échange les numéros de téléphone, au cas où… Après les deniers conseils de Bragi, le mari de Siga, sur la manière de traverser un gué et « que de toute façon avec un LandCruiser nous n’aurons aucun souci », le départ se fait vers 8h30. Askja est l’un des volcans les plus visités d’Islande, un passage obligé dans votre voyage.


La piste F88 vers Askja et ses gués

Ce n’est cependant pas la destination la plus facilement accessible. La piste F88 est longue et passe par des gués comptant parmi les plus difficiles du pays. Mais, quand on visite Askja le trajet est autant important que la destination et cette piste est l’une des plus belles d’Islande. L’entrée de la F88 est bariolée de panneaux d’avertissements indiquant la difficulté de la piste, les traversées de rivières, l’interdiction aux véhicules non 4×4 et l’absence de station service sur les 300 km suivants. Il ne faut toutefois pas s’affoler, avec un véhicule approprié et un réservoir bien plein, le trajet ne devrait pas poser trop de problèmes.

Entrée de la piste d'Askja

Les premiers kilomètres de piste dévoilent un paysage magnifique dans sa désolation : c’est un désert de cendre noire s’étendant à perte de vue. La piste n’est elle même qu’un tracé « damé » comme l’est une piste de ski au milieu de la poudreuse, mais rien d’autre ne la différencie des étendues qui l’entourent. Sur de courts tronçons accidentés, la piste sinue entre les dépôts de téphra du désert de lave d’Ódáðahraun. Elle est aussi peu empruntée et si quelques 4×4 (ou même des bus spécialement modifiés) croiseront votre route, la plupart du temps un sentiment de solitude au milieu de l’immensité vous prendra aux tripes.

Après 2 heures de conduite le tout premier gué du trajet, traversant la rivière Grafarlandaá, un affluent du Jökulsá á Fjöllum, apparaît au milieu d’une oasis de verdure, barrant la route. Cette oasis s’est crée dans le désert d’Ódáðahraun par la résurgence d’une source s’écoulant sous le champ de lave. Une courte promenade le long du cours d’eau permet de découvrir une succession de petites cascades… Il est ensuite temps de franchir le gué : pour se faire, se mettre en première et passer en manuel (pour les automatiques) puis tourner le sélecteur sur 4×4 Low. Il ne reste plus qu’à se lancer en respectant bien le trajet en arc de cercle coté aval et une vitesse constante. Un clignement d’œil plus tard nous sommes de l’autre coté sain et sauf et le véhicule n’est pas noyé !

La piste continue à longer la rive Ouest du Jökulsá á Fjöllum, tantôt sinuant dans un champ de lave, tantôt traçant en ligne droite dans un désert de cendre… Un deuxième gué, beaucoup plus large, traverse la rivière Lindaá. Celui-ci est assez difficile et il est préférable de le passer tôt le matin, avant que la rivière ne grossisse trop… Au loin, l’horizon s’efface derrière un nuage de sable et de brume dans lequel on devine la silhouette de l’Herðubreið, la « Reine des Montagnes », considérée comme la montagne nationale de l’Islande.


L’oasis d’Herðubreiðarlindir

L’Herðubreið est un volcan solitaire de type tuya (sommet plat, pente très raide et de forme cylindrique) culminant à 1680 mètres. Il s’élève au centre du désert d’Ódáðahraun, le « Champ de lave des criminels », où de nombreux criminels se seraient réfugiés durant le 17e siècle. L’exil dans les Hautes-Terres d’Islande était en effet le seul moyen aux criminels de survivre, puisque ayant perdus tous leurs droits, ils pouvaient être tués comme bon leur semblait par leurs ennemis.

Champ de lave devant l'Herðubreið

Au milieu de ce désert, l’oasis d’Herðubreiðarlindir est surprenant. Un camping et un refuge ont été aménagé, et de là partent des randonnées balisées à travers la réserve naturelle. La petite boucle d’une quarantaine de minutes (balisage vert) conduit à travers le champ de lave jusqu’à l’abri de Fjalla-Eyvindur. Ce célèbre voleur aurait vécu à Herðubreiðarlindir tout l’hiver 1774-75, sans feux et en ne se nourrissant que de racines d’Angéliques et de viande crue de son cheval. L’abri qu’il y a construit est un trou creusé dans le sol muré de pierres : y passer un hiver ne devait pas être confortable. La randonnée à travers le champ de lave ne laisse pas indifférent : son étendue donne le vertige et les plissures sur la roche témoignent encore de son ancien état liquide, laissant imaginer les coulées de magma en fusion…

Askja n’est plus qu’à environ une heure de route. En continuant la piste, le désert change de couleur et les reliefs se font plus présents. Le noir fait place à l’ocre, ça change mais c’est tout autant saisissant et on a la sensation de rouler sur une autre planète. Les véhicules sont un peu plus nombreux dans le sens inverse, la plupart des touristes faisant le voyage dans l’autre sens pour passer les gués tôt le matin.


L’ascension d’Askja

Arrivé à Askja, la première étape sera de pique-niquer au refuge de Dreki situé au pied du massif. Les gorges de Drekagil (« gorges du dragon ») sont, parait-il, magnifiques mais avec un planning serré il faut faire des choix et les visiter ne fera pas parti de ce voyage. On remarquera toutefois les myriades de petits cailloux flottant à la surface de la rivière sortant des gorges : ce sont des pierres ponce formées par l’activité volcanique.

Askja est une caldeira (un vaste cratère plat et circulaire) de 50km2 encore active. Sa dernière éruption ne remonte qu’à 1961, quand elle déversa 100 millions de m2 de lave. Certains habitants s’en souviennent encore et pourront vous le raconter, comme Bragi. Il est étonnant et passionnant de s’entendre raconter l’histoire d’une grosse éruption par quelqu’un l’ayant vécu à une centaine de kilomètres de là !

Une fois repu, il est temps de monter jusqu’au cratère du volcan. Le parcours qui y mène n’est pas tracé mais uniquement balisé par des piquets jaunes. Le départ se fait d’un petit parking, au bout de la piste F894, à 30 min de voiture derrière le refuge Dreki et longeant une énorme coulée de lave d’un noir intense… Sans les piquets jaunes plantés au milieu d’un désert de cendre noir et rouge, il serait impossible de trouver le chemin de la caldeira. Cela accentue la sensation d’être perdu au milieu de la nature, d’autant plus que l’espace autour de nous s’étend à des kilomètres. Quelques choses de sauvage et d’hostile se dégagent de ces lieux… 

Il faut 45 minutes à pied pour rejoindre le cratère, la plupart du parcours longe un massif aux formes douces et arrondies sur la gauche où déjà se dessinent des plaques de neiges donnant un patchwork ocre et blanc du plus bel effet. Sur la droite, un immense désert de roches et de cendres volcaniques s’étend jusqu’à rencontrer la chaîne de montagnes délimitant la fin de la caldeira, à 6 kilomètres de là. 

En arrivant au bout du chemin, une petite côte permet d’accéder à un des bords du cratère et la vue qui se présente petit à petit est à couper le souffle : on aperçoit d’abord un immense lac bordé de falaises abruptes, puis un autre cratère apparaît, plus proche et plus petit, dans lequel se trouve le lac Víti.


Les lacs Öskjuvatn et Víti

Panorama sur l'Öskjuvatn et le Víti

Le plus grand lac est l’Öskjuvatn, formé par l’effondrement de la chambre magmatique lors de l’éruption de 1875. Le cratère de 11 km2 ainsi crée se remplit d’eau et devint le lac le profond d’Islande (220 mètres). Inutile de dire que l’eau y est vraiment très fraîche, ce qui coûta d’ailleurs la vie à deux chercheurs allemands qui y coulèrent avec leur barque (probablement en mauvais état également) en 1907 pendant leur étude du lac. Descendre jusqu’à la plage et se laisser bercer quelques minutes par le ressac des vagues permet de se reposer des heures de pistes et du chemin à gravir pour y parvenir. Assis dans le cratère d’un volcan encore actif, on se rend compte qu’on est vraiment peu de chose face à l’immensité de la nature et l’Islande le rappelle encore et encore à chaque détour où elle ne cesse de révéler ses merveilles…

Le Víti est quant à lui un petit lac géothermique également apparut lors de l’éruption de 1875. La tradition veut que les Islandais s’y baignent (nus) lorsqu’ils viennent à Askja. Il vous faudra donc penser à prendre un maillot (ou pas) et serviette avant d’entreprendre une baignade dans cette eau laiteuse soit disant à 22°C. L’accès au lac se fait par une pente très raide dans du sable ocre qui mène à une berge assez étroite. La mise en maillot est vivifiante car la température extérieure ce-jour-là ne doit pas dépasser les 10°C malgré un magnifique ciel bleu. Il ne reste plus qu’à se jeter à l’eau ! Et là, ça se gâte car l’eau est beaucoup plus fraîche que prévue (approximativement autour de 18/20°C), ce qui permet de se baigner sans risquer l’hypothermie mais rend l’entrée dans l’eau bien moins aisée que dans les sources chaudes expérimentées. Le sol est sablonneux, siliceux, parsemés de petites algues et chaud ! De petites bulles bouillonnantes s’échappent même par endroit, brûlant les pieds comme une petite piqûre d’insecte. Mais qu’à cela ne tienne : on vient de se baigner dans le cratère d’un volcan et rien que pour l’expérience, ça valait le coup !

Une fois la baignade terminée, il faut vite se rhabiller car le froid et le vent sont certes vivifiants mais surtout désagréablement glacés, heureusement la montée réchauffe. Un dernier regard pour l’Öskjuvatn et il est temps de retraverser la caldeira pour rejoindre le parking…


Retour à Grímsstaðir

Retour par la piste F810, déserte à cette heure là, à l’exception d’une voiture Islandaise qui nous dépasse et traverse les gués à toute allure… Il était prévu de rejoindre l’Est de l’Islande par la piste F910, en passant par la vallée d’Aðalból pour y passer la nuit, mais l’oubli d’un bagage à Grímsstaðir nous oblige à rebrousser chemin et à annuler notre réservation à la ferme d’Aðalból. C’est dommage car cela avait l’air vraiment chouette, le propriétaire était très peiné de ne pas nous recevoir et la piste ralliant les fjords de l’Est avait l’air magnifique…

Piste F894 au retour d'Askja

Arrivé à Grímsstaðir, l’accueil chaleureux de Siga, qui nous reçoit bras ouverts, redonne le moral à l’équipe. Après le dîner, le séjour se remplit d’une ambiance conviviale autour d’un thé et d’un gâteau délicieux aux dates. Chacun raconte, dans un anglais plus ou moins approximatif, les péripéties de sa journée, Bragi évoque les événements marquants des éruptions de l’Askja : celle d’une extrême violence  de 1875 qui empoisonna le bétail et conduisit à une vague d’émigration aux Etats-Unis, et celle de 1961, que vécut Bragi de chez lui, à Grímsstaðir…

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4 Commentaires

  1. Bonjour
    Je chercher les ferme d’Aoalbol pour réserver mais je n’arrive pas les trouver sur internet. Vous avez fait comment pour les contacter?

    1. Bonjour,
      Je viens de mettre à jour le lien contenant leur site internet, vous trouverez leurs coordonnées ici : http://samurbondi.com/index.html

  2. Bonjour, de retour d’Islande, nous avons nous aussi, grâce à votre blog, fait cette balade, mi-août, avec la neige un peu avant l’arrivée au parking. Associée à un fort vent, pas facile d’avancer… en effet, heureusement que les piquets jaunes nous guident.

    1. Bonjour, Askja sous la neige cela doit être également magnifique !

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