Jours 1 et 2, Deux journées dans la peau d’un musher

25 et 26 Janvier 2016

Raid en traîneau à chiens - jour 1

Deux journées dans la peau d’un musher, à arpenter les chemins du parc naturel d’Hossa en Finlande en traîneau à chiens, au plus près de la nature, en dormant dans une cabane de trappeur et en testant le sauna traditionnel finlandais. Le séjour commence fort, avec ce raid en traineau à chiens de 54 km. On en prend plein les yeux et on ressort de cette première expérience complétement émerveillé par les paysages, les sensations et l’immersion.


Préparation de l’équipement et des traineaux

Arrivés la veille à Hossa vers 23h, c’est après une petite nuit que nous commençons le séjour. Le petit-déjeuner avalé, il faut ensuite récupérer l’équipement grand froid et préparer ses affaires pour deux jours de raid en traîneau à chiens. Un sac étanche de 20 litres permet de ranger quelques changes et affaires de toilette pour la nuit. On aurait préféré un départ plus soft, en gardant le raid en traîneau pour la fin, mais au final l’organisation de Norwide était au top et on n’a aucune difficulté à se mettre dans le bain. On rejoint ensuite le groupe devant l'auberge.

Notre guide pour la semaine est Thomas et nous partageons les activités avec 7 autres personnes (groupe de 10). Pour le raid en traîneau, le groupe est séparé en deux, chacun accompagné par un guide en tête du convoi, mais on se rejoint lors des pauses à midi et le soir au refuge. Direction le chenil, situé à quelques kilomètres de là. On se rend vite compte pourquoi il est éloigné de la base : les aboiements et les jappements des chiens, excités à l’idée de partir, se font déjà entendre alors que nous ne sommes même pas encore arrivés !

Le Chenil

On commence par un briefing sur le fonctionnement du traîneau à chiens, les règles de pilotage et la préparation de l’attelage, à l’abri du regard des chiens pour qu’ils se calment (voir l’encart en bas de page pour plus de détails). Nous serons les seuls maîtres à bord, chacun pilote son propre traîneau et s’occupe de ses chiens et de l’attelage. C’est le premier jour et personne ne se connait encore, je peux dire que c’est très sérieux dans les rangs, tout le monde écoute attentivement !

Après un test pour passer le harnais à un chien, on découvre le chenil et notre traîneau. Le chenil compte 160 chiens, des Alaskans Huskies et des Groenlendais, dotés d’une grande endurance et pouvant supporter des températures négatives allant jusqu’à -40°C. J’ai quatre chiens : Woody, à qui je donne les ordres, et Puppy, les deux chiens de tête, Arko (qui signifie timide en Finlandais et qui passe son temps à manger son harnais) et Even comme wheel dogs. Il faut ensuite aller les chercher dans leur enclos, leur passer le harnais et les positionner sur l’attelage. Tout ça dans un brouhaha étourdissant avec des chiens surexcités… Bizarrement, mes premiers gestes sont clairs et précis, ce sera par la suite que je m’emmêlerais les pinceaux avec les harnais.


Etape 1, d’Hossa à Peurapirtti

C’est parti pour 27 km de traîneau pour cette première journée de raid en traineau à chiens. Notre groupe se positionne, les guides vérifient les attelages et sont là pour nous aider. Le traîneau de Thomas s’élance, suivi par ceux de Catherine et Lucas ; les chiens jappent et sautent, mon traîneau sursaute sous l’assaut de mes chiens. Aurélie m’enlève l’ancre, je lève progressivement mon pied du frein en lançant un timide « Arko, devant ! » et le traîneau décolle du sol. On quitte le chenil et on s’engouffre dans la forêt, le chemin est tracé et rectiligne. Je cherche à tâtons le patin droit pour y poser mon pied… ça y est, l’aventure commence !

Le traîneau prend de la vitesse, le vent s’engouffre sous ma chapka et un frisson de froid (ou de plaisir) me traverse… En sortant de la forêt, on longe ensuite le lac Niskaselkä avant de repartir sous les arbres, de lacs en lacs, de forêts en forêts. Le paysage est d’un blanc immaculé. Il est à peine midi et pourtant on se croirait en fin de journée, le soleil est bas et ses rayons, orangés, apparaissent timidement derrière les nuages. Seuls les patins glissants sur la neige et l’halètement des chiens se font entendre. Le froid engourdit les extrémités, les cils et les quelques cheveux laissés à l’air libre se recouvrent d’une fine couche de givre, les pieds sont recouverts d’une épaisse couche de poudreuse… Les passages sur les lacs ou en haut d’une (petite) crête laissent apercevoir un peu de profondeur dans ce décor monochrome de taïga mais la forêt n’est jamais bien loin, elle nous enveloppe. Les arbres, plissant sous le poids de la neige, défilent…

Lac Lounaja

Au cours de cette première matinée, nous aurons parcouru 15 km. À 13h, on marque une pause au feu de camp Lipposensalmi, en bordure du lac Lounaja. On en profite pour féliciter les chiens tandis qu’ils se roulent dans la neige. Il s’agit d’un petit abri ouvert doté d’un coin feu, d’une réserve de bois et de toilettes sèches.

Le parc naturel d’Hossa compte un nombre impressionnant d’abri de ce genre, ainsi que des cabanes de trappeur, plus grandes, comme celle dans laquelle nous dormons ce soir. En été, elles sont prisées lors des randonnées, des sorties en canoë et des parties de pêche. Thomas prépare un feu tandis que le deuxième groupe, accompagné de leur guide Romain, nous rejoint. Au menu : soupe lyophilisée, croque-monsieur au feu de bois et gâteaux en dessert. Le fait de s’arrêter nous refroidi tous, il faut dire aussi que c’est la journée la plus froide du séjour : -20°C. On se réchauffe comme on peut, autour du feu en buvant un thé bien chaud mais on ne peut pas s’attarder trop longtemps.

On reprend la route vers 14h pour une étape de 12 km. On tourne un peu en rond autour des lacs Lounaja et Ala-Valkeainen mais ce n’est que pour mieux apprécier le superbe coucher de soleil qui s’offre à nous. Le ciel se teinte de couleurs rosées et orangées et le soleil, rasant, enveloppe le paysage de douces couleurs pastel. Il n’en faut pas plus pour que les garçons dégainent leurs appareils photo sur le traîneau et essayent d’immortaliser ces instants. Exercice difficile, avec les gants et les soubresauts du traîneau… Ayant deux mains gauches, je ne m’y risque pas et profite égoïstement de ce magnifique paysage qui est passé en l’instant de quelques heures d’un décor figé monochrome et apaisant à un décor vivant et vibrant sous les couleurs survitaminées du coucher de soleil…

Coucher de soleil sur le lac

Soirée à la cabane de trappeur de Peurapirtti

Voilà de quoi nous donner la pêche jusqu’à la fin de journée, car elle est loin d’être finie. La vie de musher ne se termine pas au coucher du soleil, loin de là ! On arrive au refuge, situé près du lac Iso-Valkeainen, vers 15h30. Chacun doit s’occuper de son attelage (câliner les chiens, les attacher pour la nuit, leur enlever leur harnais) avant de découvrir la cabane de trappeur de Peurapirtti, où nous passerons la nuit.

À l’image des refuges en France, la cabane de Peurapirtti offre un confort sommaire, sans eau ni électricité, mais dispose de tout le nécessaire pour dormir et faire la cuisine (lits superposés, toilettes sèches). Mais, comme tout hébergement finlandais, on y trouve en plus un sauna traditionnel, celui-ci est avec un poêle à bois ! Tandis que certains partent chercher du bois et couper du petit-bois pour allumer les poêles, d’autres vont chercher de l’eau à la pompe et en ramènent dans de grands bacs ou ramènent du mobilier dans le refuge principal pour qu’on puisse passer la soirée tous ensemble. On se retrouve autour de la table pour un goûter et débriefer la journée, nos lampes frontales déjà visser sur nos fronts.

Vient ensuite le moment de nourrir les chiens. Ils ne mangent qu’une fois par jour, le soir, et leur repas est composé d’un morceau de viande dur (voir gelé) et d’un bol de soupe aux croquettes pour les hydrater. Mais, comme rien n’est simple dans la vie de musher, il faut couper à coups de hache les gros blocs de viande, sous les aboiements et le regard lumineux des chiens apparaissant dans la nuit noire. Tâche difficile, il faut viser juste, taper fort et couper environ 45 morceaux… certains s’en sortent mieux que d’autres !

La journée se termine par un moment de détente au sauna tandis que d’autres n’ayant pas voulu se joindre à nous sont de corvée patates ! Le sauna traditionnel n’a rien à voir avec le sauna électrique : l’unique et douce lumière du poêle, la bonne odeur du pins brûlé et les crépitements du bois nous plongent tout de suite dans une ambiance relaxante. La chaleur enveloppe nos corps et les bouffées de vapeur produites par l’arrosage des pierres nous atteignent progressivement pour une détente totale. Pour que l’expérience soit totale, les garçons avaient au préalable cassé la glace du lac et creusé un trou. Une fois « à point » ils sont allés s’immerger dans l’eau glacé du lac après avoir traversé la distance qui sépare le refuge du lac à pieds, dans la neige. C’est cette partie qui est la plus douloureuse : malgré le corps surchauffé dans le sauna, les pieds, au contact de la neige à -1°C voir moins, brûlent. L’immersion dans l’eau, qui elle est supérieure à 0°C, est alors beaucoup plus « facile ». Rien de tel pour stimuler la circulation sanguine et renforcer son système immunitaire.

Après cette longue mais magnifique journée, il est temps de se détendre, en partageant un moment convivial avec le groupe autour d’un bon plat de tartiflette maison.


Etape 2, de Peurapirtti à Hossa

On se lève à la cabane de Peurapirtti  sous un ciel couvert et des températures encore fraîches, -15°C. Le temps de prendre le petit-déjeuner, de ranger, nettoyer les cabanes et de préparer les attelages, nous nous mettons en route vers 11h. Cette deuxième journée de raid en traîneau à chiens est plus technique, avec des passages étroits et sinueux dans la forêt, des montées et des descentes, quelques fois raides, en approche des lacs. Il faut bien contrôler son traîneau, vérifier que la ligne de trait soit bien tendue, freiner dans les descentes et bien négocier les virages en freinant et en aidant le traîneau à glisser et tourner au bon moment. Thomas nous laisse plus de liberté, on espace les traîneaux de 30 à 40 secondes, jusqu’à perdre de vue celui de devant. Cela donne la sensation grisante d’être seule au monde.

Nous parcourons environ 11 km le matin dans le Nord du parc naturel d’Hossa, en passant par le lac Laukkurjärvi et à travers la forêt primaire. Pause déjeuner au feu de camp Likoski, près du lac Hypäs. La neige commence à tomber et recouvre les chiens d’un grand manteau blanc. Là encore, menu chaud au coin du feu, ce qui est vraiment très agréable : soupe, cakes chorizo chèvre et banane-chocolat en dessert, quel luxe !

L’après-midi est moins agréable et plus difficile car il y a de grosses chutes de neige qui masquent la visibilité. Manque de bol, mon masque (que j’ai négligemment laissé sur ma tête) a givré à l’intérieur, il est donc tout mouillé et inutilisable. Difficile de sortir un linge sec pour nettoyer son masque sur un traîneau… Petit conseil en cas de chutes de neige : penser à bien mettre son matériel à l’abri ! L’étape de 16 km avec la neige me giflant le visage est assez compliquée mais j’essaye de voir le bon côté des choses : nous aurons fait de traîneau par tout temps !

Un musher sur son traîneau

Arrivés au chenil, il faut ranger le matériel et dire au revoir à nos fidèles compagnons : Woody, un leader sérieux et affectueux, Puppy à la fourrure magnifique, Even plein d’entrain et toujours excité et enfin Arka, qui aura finalement réussi à casser son harnais et qui n’aime pas les caresses… Finalement, je suis contente d’avoir fait le raid en début de séjour, j’aurais été trop triste de partir directement après cette expérience grandiose. En plus, le dernier jour nous réservera une bonne surprise : nous pourrons revenir voir une dernière fois nos compagnons à quatre pattes (pour ceux qui ne seront pas partis en raid).

De retour à l'auberge, chacun rentre « chez soi » le temps de tester le sauna (électrique cette fois) et de prendre une bonne douche, avant de se retrouver au bar de l’auberge pour prendre l’apéro. Première vrai soirée à l’auberge, on commence soft en testant la bière locale, la Karhu. Au menu du buffet de ce soir : saumon, riz et haricots verts, crudités en entrée et cake au café en dessert. On finit la soirée en testant un digestif, le seul qui n’est pas de la vodka, le Jaloviina, un genre de Cognac, produit exclusivement en Finlande et qui est très bon.


Quelques informations utiles

Pour le fonctionnement, rien de plus simple : nous sommes placés les uns derrière les autres, en suivant la trace d’une moto-neige ayant tracée le parcours plus tôt, avec le guide en tête bien sur et son attelage d’environ 7-8 chiens car il transporte beaucoup de matériel (non, on ne se double pas, on ne fait pas la course ! quoique… il y en a à qui c’est arrivé…).

Un attelage classique compte 4 à 5 chiens, placés en tandem, avec deux chiens de tête (leader), un chien au milieu (swing) et deux chiens à l’arrière (wheel), au plus près du traîneau, qui sont les chiens les plus puissants. Chaque chien est attaché par deux extrémités, grâce à un harnais, à une ligne centrale (la ligne de trait). Pour les positionner sur l’attelage, il faut commencer par ceux de l’avant puis continuer vers ceux de l’arrière.

Le musher (le pilote) doit veiller à ce que la ligne de trait soit toujours tendue ; ralentir lorsque les chiens ralentissent, descendre du traîneau et le pousser dans les montées ; et surveiller que les chiens ne s’emmêlent pas les pattes.

À l’arrêt, il faut toujours avoir les deux pieds sur le frein (une genre de grosse griffe située entre les deux patins). Une ancre (une très grosse griffe) se plante ensuite dans la neige pour retenir le traîneau, qu’on aura pris soin de renverser sur le côté au préalable.

Pour le pilotage, les ordres se donnent à la voix : le nom du chien de tête suivi de l’ordre, « allez » ou « devant » pour avancer, « Oooh » pour s’arrêter, en freinant en même temps, puis « gauche » et « droite ». Ces deux derniers ne marchent pas vraiment. Faut dire qu’on n’a pas les chiens les plus intelligents, ils sont réservés pour les guides ceux-là !

Et, en cas de chute ? Rien ne sert de s’accrocher éperdument au traîneau si on n’est pas capable de se relever… Il faut essayer de prévenir l’avant du convoi pour que le musher de tête puisse attraper les chiens et stopper le traîneau en perdition, puis monter dans celui de derrière pour rejoindre son traîneau. Celui qui ferme la marche est équipé d’un talkie-walkie. Heureusement, nous n’avons pas eu besoin d’appliquer cette méthode car personne de notre groupe n’est tombé !

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2 Commentaires

  1. J’adoooore !!! Si on glisse la souris sur les images on voit apparaître le nom des chiens …

    1. Oui, c’est fou comme on s’attache à eux en si peu de temps 😉 !

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