Initiation au bushcraft, dans un secret spot en Ardèche

29 et 30 Juin 2018

J1_Bushcraft_pano

En juin 2018, je fis une expérience insolite et pleine de découvertes lors d’un week-end d’initiation au bushcraft… Au quoi ? Mais si, tu sais cet “art de vivre dans les bois” grâce à des techniques ou des compétences plus ou moins anciennes et dans le respect le plus total de son environnement. Mais pourquoi ?! Parce que j’aime la nature, j’aime randonner et bivouaquer, et j’estime que c’est important de bien connaître son environnement et de savoir l’appréhender pour pouvoir s’aider de ce qui nous entoure.

Groupe atelier feu

C’est ainsi qu’en juin 2018, avec une partie de mon équipe de Paintball, les HellJumpers on retrouva Kaio, notre maître de stage, devenu pro dans l’art du bushcraft, dans un coin perdu de l’Ardèche. Nous l’avions rencontré lors d’une “opération extérieure » de paintball réunissant plusieurs équipes de la France entière et, en discutant avec lui, on s’est aperçu de tous les bénéfices que cela apporterait d’apprendre ses techniques, à la fois pour notre équipe de paintball Milsim et pour l’immersion qu’on souhaite donner à nos événements mais aussi dans nos vies personnelles, nombreux d’entre nous pratiquant des sports d’extérieurs.


LE BUSHCRAFT, KESAKO ?

Kaio donne une définition très claire de sa pratique : « Le « bushcraft » signifie « l’artisanat de la brousse », c’est un terme provenant d’Afrique du sud. En France on pourrait appeler ça le « woodcraft » signifiant « l’artisanat des bois ». C’est une façon de vivre avec la nature, la forêt, la brousse et qui nécessite des compétences plus ou moins anciennes dans différents domaines comme la botanique, la chasse/pêche, la poterie, les cordages naturels, allumer un feu, s’orienter, construire un abri et du mobilier etc… en s’aidant des éléments que l’on trouve autour de soi. Toutes les ressources nécessaires ou presque pour vivre se trouvent dans la nature, il suffit simplement de les connaître et de savoir les travailler. »

Au final, nombreux sont ceux qui pratiquent le bushcraft sans le savoir. Et depuis les années 2000 et la popularisation de ce terme, il y a autant de définition qu’il y a de bushcrafteur… Mais, limiter le bushcraft à un ensemble de techniques modernes ou ancestrales serait réducteur. Aujourd’hui, si l’on se tourne vers cette pratique s’est également pour y rechercher quelque chose ou du moins suivre une philosophie de vie.

Kaio le résume très bien : « Au delà des compétences nécessaires requises pour vivre dans la nature, le bushcraft est pour moi avant tout un état d’esprit. Je vois ça comme une façon de se rapprocher de la nature pour essayer de mieux la comprendre afin de pouvoir mieux se comporter face à elle. Une manière d’utiliser ses mains comme le faisait nos ancêtres même si on utilise souvent des outils modernes. C’est aussi une façon pour moi de me retrouver face à moi-même dans un environnement non pollué par la technologie moderne et donc de canaliser mon énergie sur des choses simples mais essentielles. Quand je pars dans les bois, c’est comme si j’allais en thérapie sauf que je n’ai pas besoin de raconter ma vie à quelqu’un pour me sentir mieux quand je rentre chez moi. La forêt est vivante et m’aide à me sentir mieux quand j’en ai besoin, mais elle a aussi une âme et une histoire. Je pense sincèrement que chacun de nos faits et gestes ont bien sûr des répercussions sur la forêt mais aussi sur nous même. Pour cela je la respecte profondément et reste humble face à elle. » 

De quoi raviver mes envies de grandes aventures en tant qu’exploratrice en herbe de contrées lointaines. Bon là, la contrée lointaine se trouve en fait être l’Ardèche, dont nous garderons secret le lieu exact :-b !


LE LIEU IDÉAL POUR UN WEEK-END BUSHCRAFT

Prendre le temps de déterminer son prochain lieu de bushcraft est une étape essentielle et cela dépendra notamment des activités qu’on souhaite pratiquer. Là, à la fin juin, l’idée était de trouver un endroit avec une source d’eau à proximité car, avec la chaleur, il était primordial de pouvoir se ravitailler facilement.

Les techniques de Kaio en la matière : « Je me sers souvent de Google map et Geoportail pour localiser des potentiels zones pour bivouaquer. Sur Geoportail il y a des cartes IGN, ce qui aident fortement à comprendre le terrain et connaître en partie le biotope (forêt de conifères, feuillus, les deux…). Cela évite une fois sur place de tomber sur des ravines, falaises, terrains en forte pente, etc…. Je cherche en priorité des points d’eaux pour éviter d’avoir à transporter dans mon sac trop de poids. Je cherche des zones où je croiserais le moins de personnes possibles, loin des sentiers battus afin de garder une certaine tranquillité. »

Pour ce week-end, l’endroit trouvé par Kaio était idyllique : dans un endroit escarpé, au fond d’une gorge et en bordure d’une rivière, un petit replat nous a permis d’établir notre camp de base, sous le couvert des arbres. Nous étions à l’écart des chemins de randonnée et des habitations. Cela se paye, il faut généralement marcher loin pour être tranquille et donc ne pas avoir peur de porter les affaires sur plusieurs kilomètres et/ou en terrain accidenté et non marqué. !


CONSTRUIRE SON ABRI POUR LA NUIT

Une des premières choses à faire consiste à se construire son abri pour la nuit. Au sol, sous un tarp ou un abri de branchages, dans une cabane si vous avez le temps, sur un lit de camp, ou en hamac… C’est cette solution que nous avons choisi pour la majorité, notamment car c’est le mode de couchage adopté lors des opérations paintball. Pour le coup, c’était plutôt confort : chacun avec son tarp, pour protéger de l’humidité, des insectes, de la lumière, sous lequel on installe le hamac, assez haut pour éviter aux bêtes de venir, et un bon duvet pour prévenir de la fraîcheur la nuit. Il existe plusieurs techniques pour positionner le tarp, placer les para-cordes et faire des nœuds. Et bien vous savez quoi ? Je n’ai jamais aussi bien dormi et malgré ce qu’on croit, on n’a absolument pas mal au dos, du moment que le hamac est bien tendu.

Quelques astuces : ajouter un matelas souple (type gym), à l’intérieur du hamac pour isoler le dos et mettre du vinaigre blanc sur les cordes du hamac pour éviter aux insectes, notamment les fourmis de grimper à l’intérieur.

Voici une vidéo de Kaio expliquant comment il installe son hamac en forêt.

→ Matériel nécessaire : hamac, cordes et paracordes, duvet, tarp. | Matériel facultatif : mousquetons, sardines, bâche, matelas souple.


SAVOIR FAIRE DU FEU

La deuxième priorité est de savoir faire du feu. Le feu réchauffe, cuit, stérilise, éloigne les nuisibles, bref, c’est la base. Cela peut paraître évident mais la plupart des enseignements transmis relèvent du bon sens. Ainsi, préférez établir le foyer près d’une source d’eau s’il y a, en forêt, le feu doit se trouver dans une zone dégagée, sans branches basses. Nous choisissons donc un espace à la lisière de la forêt sur une surface où se trouve du sable (moins dangereux, et le feu est plus facile à éteindre si besoin), puis nous débroussaillons tout autour. Il faut prévoir un périmètre de sécurité autour du foyer, on peut également le contenir à l’intérieur d’un cercle de pierres, ce qui est également plus pratique pour cuisiner, placer un trépied etc.

Tout au long du week-end, nous serons amenés à allumer et entretenir le feu. Kaio nous montrera comment préparer un feu, à l’aide de brindilles mais également d’écorces de bouleau (très inflammable), démarrer un feu à l’aide d’un firesteel ou d’un briquet médiéval… Nous aurons même un exercice de type survie : allumer un feu le plus rapidement possible pour indiquer sa position !

→ Matériel nécessaire : firesteel (pierre à feu)  |  Matériel facultatif : des gants en cuir et une pelle (pour les manipulations dans le feu et les braises), un bouffadou (instrument traditionnel pour attiser le feu).


AMÉNAGER LE CAMP

Les techniques du froissartage ou du brêlage relèvent de techniques scouts et font parties intégrantes des activités de bushcraft. Il s’agit en fait d’assembler plusieurs éléments naturels entre eux pour créer des objets ou du mobilier. A l’aide de nos haches et de nos scies, on se met alors en quête de branches, de troncs d’arbres, on les taille, on y fait des entailles et on les assemble, on peut solidifier la construction par des cordelettes ou de la ficelle en chanvre ou en jute. Notre camp devient alors confortable  (pas aussi bien que ceux que Kaio peut monter mais nous sommes partis de zéro !) : une table en hauteur pour poser la vaisselle, un banc, des chaises en cordage…

Cela prend toutefois du temps de réaliser toutes ces constructions, c’est pourquoi il est important de toujours utiliser des éléments naturels, afin de pouvoir laisser les constructions sur place en prévision d’un prochain bushcraft. Kaio et ses amis améliorent sans cesse leur camp de bushcraft et leurs installations sont impressionnantes. En voici quelques photos :

→ Matériel nécessaire : hachette, scie pliante, divers couteaux à lame fixe, cordelette en chanvre, paracorde, gants (en cuir, pour protéger des coupures).


MANGER EN PLEINE NATURE

Il s’agit d’un week-end buschraft plutôt confort comme je vous l’indiquais plus haut. Il n’est pas question de se la jouer survie et de ne manger que ce que l’on trouve, pêche et chasse… Avec les repas que nous a prévu Kaio, c’est sûr qu’on ne va pas mourir de faim !

Concernant la conservation des aliments, pour les aliments secs, le mieux est de prévoir un grand sac pouvant être suspendu en l’air, au bout d’une corde. Cela évite aux animaux et aux insectes de venir grignoter vos réserves. Nous avions prévu également de la viande crue. Là pour la conservation, nous avons opté pour une glacière, que nous avons enfouie sous la terre et dont le couvercle était constamment recouvert d’un linge humide que nous allions tremper dans la rivière. Cela se rapproche de la technique du frigo du désert : deux pots en terre cuite / argile de tailles différentes qu’on met l’un dans l’autre, on place du sable entre les deux pots qu’on arrose régulièrement et on place un linge humide sur le dessus. L’évaporation de l’eau va permettre le refroidissement du pot interne et une conservation plus longue des aliments. Parmi les autres techniques, on trouve aussi l’immersion dans de l’eau froide, les aliments placés dans un bidon ou un sac hermétique.

Au niveau des repas, ce fut un grand luxe : pain au feu de bois (cuit à l’intérieur d’une popote sous les braises), rôti et poulet à la broche, patates, bananes flambées et pommes cuites, un régal ! Si les pains de Kaio sont une réussite, le nôtre l’est moins, car nous n’avions pas assez de braises et le temps d’en refaire, le fond du pat a cramé et le pain n’a pas levé… Nous avons même fait une petite salade de pissenlits, à défauts d’avoir trouvé d’autres plantes comestibles sur le terrain…

→ Matériel nécessaire : popote de camping, couverts, couteaux, gobelet, gourde.


SCULPTURE SUR BOIS ET AUTRES TECHNIQUES

La sculpture sur bois et la fabrication d’objets courants sont également une activité essentielle du bushcraft. Nous avons réalisé pendant ce week-end (enfin la mienne n’est toujours pas terminée), une cuillère en bois, en la taillant d’un bloc. Mais, il est possible aussi de faire des bols, des kuksas…

Il faut bien sûr beaucoup de patience, le bon coup de main et la bonne essence de bois. Ici nous avons pris du bouleau, une branche pas trop épaisse dans du bois vert, car il est plus facile à travailler (mais il peut se fendre). L’idée générale est de dégrossir à la hachette la branche afin d’obtenir une planchette bien plate. On choisit ensuite où faire le manche et le creux de la cuillère et, soit à la hachette soit au couteau, on crée la forme de la cuillère petit à petit. Pour creuser la matière au niveau de la cuillère, on utilise enfin un couteau croche, un couteau spécifique à la lame incurvée dédié à la sculpture du bois. Conseil : il faut éviter d’avoir des nœuds dans le morceau de bois qu’on garde, car cela va fragiliser l’objet, voire même le fendre.

Nous avions la chance, lors de ce week-end, d’avoir une source d’eau à proximité, et pas des moindres, nous permettant de nous rafraîchir et de laver la vaisselle. Une des techniques consiste à fabriquer du savon à base de cendre, d’eau et de résine de conifères. Après en avoir récolté sur les troncs des arbres (ce qui peut s’avérer assez long), Kaio nous en fait la démonstration. La cendre, ce n’est plus à démontré, a des propriétés lavante, et la résine de conifères quant à elle permet de désinfecter.

→ Matériel nécessaire : hachette, scie pliante, couteaux à lame fixe et couteau croche.

♦ ♦ ♦

On a tous une part d’aventurier en nous, et pouvoir vivre dans la forêt en fait partie. J’avais déjà abordé quelques techniques de bushcraft liées à la vie de trappeur dans le Grand Nord lors de mon voyage en Finlande et j’ai pratiqué le bivouac lors de mes treks, mais les objectifs étaient alors différents. Ce week-end là m’a apporté beaucoup plus de compétences, j’ai acquis plus d’autonomie et d’aisance. Je me sens dorénavant plus capable de partir seule dans la nature (bien que ce ne soit pas un but en soi), d’apporter moins de matériel avec moi et de pouvoir faire face à plusieurs situations. Et, même si cela ne m’était pas étranger, j’ai aimé cette « reconnexion » à l’essentiel et à la nature. Etant en groupe, je me suis même isolée à plusieurs reprises pour pouvoir vivre un peu égoïstement ces moments…


PORTRAIT D’UN PASSIONNÉ

L’objectif de ce stage était de nous initier au bushcraft en partageant sa passion et en passant un moment avant tout convivial. Kaio, en tant que passionné et le pratiquant depuis des années s’est maintenant professionnalisé dans cette voie, proposant des stages comme celui-ci à ceux voulant découvrir cette pratique ou perfectionner certaines pratiques. Je vous propose d’en découvrir un peu plus sur lui et son parcours :

⋅ Que recherches-tu quand tu pars en bushcraft ?

« Je recherche avant tout la paix et la tranquillité. Je suis un homme stressé par toutes ces technologies modernes, me retrouver dans les bois me permet de décharger tout ce stress que j’accumule au quotidien. Ensuite, j’ai besoin d’améliorer mes connaissances sans cesse, de créer de nouvelles choses et d’améliorer mon camp. C’est aussi un moyen de passer du bon temps entre amis, cuisiner un bon repas après une journée bien remplie, puis dormir à la belle étoile…. ça n’as pas de prix ! »

⋅ Comment es-tu arrivé à en faire ta profession ?

« Grâce à de nombreuses années d’expériences et de pratiques… Ça faisait déjà plusieurs années que j’organisais des « stages gratuits entre potes » pour initier mes proches et les proches de mes proches à la vie dans les bois. Je suis un passionné et mes passions ont toujours orientées ma vie. De plus, j’ai toujours aimé transmettre mon savoir. Alors, suite à la perte de mon ancienne activité (qui était aussi une passion), je me suis doucement orienté sur cette branche. Aujourd’hui, j’ai crée ma société « Kaio Bushcraft » où je propose des stages de vie dans la nature allant d’une journée jusqu’à une semaine. J’ai aussi la chance d’avoir pu rejoindre depuis quelques mois la société « Time on Target » qui propose des expéditions à l’étranger ainsi que des stages de survie. Nous avons créé ensemble une nouvelle cellule « Bushcraft » au sein de leurs société. »

⋅ Quelle est la chose la plus importante à transmettre à tes stagiaires selon toi ?

« L’idée c’est quand même que chacun reparte du stage satisfait de ma prestation. Si les techniques et connaissances abordées sont assimilées, alors j’ai réussi la première étape. Mais ce n’est pas cela le plus important à mes yeux. Je sensibilise les stagiaires sur le comportement et l’impact de chacun sur notre environnement le plus proche à ce moment présent, c’est à dire la forêt. Si mon message est passé il se répercutera pour chacun dans la vie de tous les jours. »

⋅ Le bushcraft est-il encadré légalement en France ?

« Il n’existe aucun diplôme dans le domaine du bushcraft ou de la survie en France. Pour faire les choses correctement il faut avant tout avoir une structure juridique comme une micro-entreprise ou une association. Ensuite il faut une assurance, des diplômes comme le PSC1 et PSC2 ou autres pour les premiers secours, des diplômes tels que le CQP randonnée, guide montagne etc sont un réel plus pour encadrer des groupes.
Personnellement j’ai tout appris par moi même au travers des scouts d’Europe et de mes années d’expérience. Hormis le PSC1 je n’ai pas de diplôme en rapport avec ma pratique. En revanche je pense être un bon pédagogue (malgré ma timidité). »

Certaines des photos de cet article ne m’appartiennent pas mais m’ont été prêté gracieusement par Kaio et les Helljumpers. Merci à eux et pour ces bons moments passés ensemble !
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